Arnon Grunberg
Evene.fr,
2007-09-06
2007-09-06, Evene.fr

Le Messie juif


Thomas Yadan

Résumé du livre

La mission de Xavier Radek ? Devenir le Consolateur du peuple juif. Ainsi commencent les tribulations de cet adolescent agnostique, issu de la bonne société bâloise. Alors que ses parents attribuent son attirance pour la culture juive aux troubles de l'adolescence, Xavier se lie à Awromele, le fils d'un rabbin, qui lui conseille de prendre des cours de yiddish et de se faire circoncire. Malgré cette opération douloureuse (et la perte d'un testicule), Xavier se voit conforté dans sa vocation. Après diverses mésaventures et malentendus, tous deux finissent par rallier la Terre promise.

La critique

Un petit-fils de nazi qui décide de devenir le consolateur des juifs par la voie du messianisme passe encore. Mais que ce même Xavier, en tentant de se faire circoncire par un vieux juif léniniste, perde un testicule qu’il nommera “le roi David”, seul Arnon Grunberg pouvait déployer autant d’extravagance, de drôlerie et de subversion. Avec son dernier roman ‘Le Messie juif’, l’auteur néerlandais pousse la dérision extrêmement loin. Comment imaginer un orthodoxe juif adolescent pratiquant une fellation juste avant une circoncision sauvage ? Rien n’échappe à la caricature implicite de Grunberg : la religion, le sionisme, le terrorisme, la politique, la famille, etc. Ce qui pourrait apparaître comme une forme de nihilisme semble plutôt une manière comique de relativiser l’esprit de sérieux et de moquer les valeurs figées. De l’absurde jaillit la contrepartie des évidences, des vérités cachées et se brise les tabous occidentaux. Ainsi, ce roman d’un humour sans commune mesure est un petit joyau dont le style et les situations rendent, d’une certaine manière, le plus bel hommage à ce que l’on pouvait considérer autrefois comme une farce. Il ne s’agit, dès lors, non pas de penser que rien n’a d’importance, mais d’appréhender, plus simplement, la condition humaine comme une mise en scène à la fois drôle et tragique. Une preuve que la dérision puise ses qualités dans ce qu’il y a de meilleur : dans les extravagances de la raison.